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Conduction thermique

1. Transferts thermiques

Le transfert thermique est un échange d'énergie entre deux corps causé par leur différence de température. Il existe trois types de transfert thermique :

La conduction thermique (ou diffusion thermique) est un mode de transfert d'énergie qui se fait à l'échelle microscopique. Dans les solides non métalliques, le transfert de l'énergie entre deux zones de températures différentes se fait par échange d'énergie de vibration entre les atomes du réseau cristallin. Dans les métaux, l'énergie thermique est aussi transportée par les électrons de conduction, ce qui rend le transfert plus efficace. La conduction thermique est rapide sur des petites distances, mais très lente sur les grandes distances.

Dans les fluides, il y a de la conduction mais aussi de la convection, qui est un échange d'énergie par déplacement de matière à l'échelle macroscopique. La convection peut être forcée ou naturelle. Un exemple de convection naturelle est celle qui apparaît au dessus des convecteurs électriques utilisés pour le chauffage domestique. La convection associée à la conduction est beaucoup plus efficace que la conduction sans convection, c'est pourquoi on fait intervenir des fluides pour accélérer les échanges thermiques.

Le transfert thermique par rayonnement vient de l'émission thermique des corps. Tout corps émet un rayonnement électromagnétique, dans un domaine de longueur d'onde d'autant plus bas que le corps est chaud. Par exemple, le Soleil émet un rayonnement thermique qui s'étend de l'ultraviolet à l'infrarouge proche. Les corps à température ambiante émettent dans l'infrarouge lointain. D'autre part, les corps absorbent plus ou moins le rayonnement qu'ils reçoivent. Pour comprendre sommairement l'échange par rayonnement, considérons deux corps pouvant échanger du rayonnement. Le milieu qui les sépare est supposé transparent, et peut être le vide. Le corps froid reçoit un rayonnement provenant du corps chaud et l'absorbe en partie. Il émet aussi un rayonnement, fonction de sa température. Le corps froid reçoit plus d'énergie qu'il en émet. C'est l'inverse pour le corps chaud. Le bilan global est un flux d'énergie du corps chaud vers le corps froid.

rayonnement.svgFigure pleine page

Dans l'atmosphère, les transferts thermiques se font surtout par convection et par rayonnement. La conduction n'intervient qu'à petite échelle.

Ce chapitre constitue une introduction aux transferts par conduction dans les solides. La convection sera utilisée comme condition limite à la surface d'un solide.

L'étude de la conduction relève de la thermodynamique des phénomènes hors d'équilibre. Pour comprendre le problème, considérons deux solides à deux températures différentes, qui sont mis en contact à l'instant t=0. La chaleur peut alors s'échanger par conduction à la surface de contact, mais aussi à l'intérieur des corps. On suppose que l'ensemble des deux corps n'échange pas d'énergie avec l'extérieur. Dès que les deux corps sont mis en contact, le système n'est plus à l'équilibre. Il évolue vers un état d'équilibre caractérisé par une température uniforme. La figure suivante montre le profil de température dans les deux corps au début, pendant la transformation, et à l'équilibre final. Le temps nécessaire pour atteindre l'équilibre (temps de relaxation) est noté τ.

conduction.svgFigure pleine page

L'objectif de l'étude du transfert par conduction et de déterminer l'évolution de la température T(x,t) pendant la transformation, en particulier pour obtenir le temps de relaxation.

2. Température et Flux thermique

2.a. Échelles de longueur

On définit trois échelles de longueur :

  • l'échelle microscopique;
  • l'échelle mésoscopique;
  • l'échelle macroscopique.

Pour un solide, l'échelle microscopique est l'échelle atomique, c'est-à-dire le nanomètre. L'échelle mésoscopique est l'échelle à laquelle il faut se placer pour définir les grandeurs thermodynamiques comme la température, l'énergie interne massique, ou la concentration. Un volume mésoscopique doit être petit à l'échelle macroscopique, mais doit contenir un grand nombre d'atomes. Un volume mésoscopique cubique de côté 1μm a une taille négligeable à l'échelle macroscopique (pour une expérience de quelques centimètres), mais contient un très grand nombre d'atomes, ce qui permet de définir l'énergie interne et la température pour ce volume.

La température et l'énergie interne massique sont définies localement à l'échelle mésoscopique. À l'échelle macroscopique, on observe en général une variation de ces grandeurs d'un point à l'autre de l'espace. Puisque l'échelle mésoscopique est très petite par rapport à l'échelle macroscopique, on peut considérer ces grandeurs comme des fonctions continues des variables d'espace :

T(x,y,z,t)(1)u(x,y,z,t)(2)

2.b. Flux thermique

Soit Σ une surface située dans milieu matériel, orientée par un choix de sens pour sa normale. Soit δQ la quantité de chaleur qui traverse cette surface dans le sens de la normale, entre les instants t et t+dt. Le flux thermique (ou flux de chaleur) est :

Φ(t)=δQdt(3)

Cette définition est analogue à celle du flux de charge en électromagnétisme (intensité du courant électrique). Les notations sont d'ailleurs identiques. Le flux thermique se mesure en watt. Il s'agit donc d'une puissance thermique. Il mesure la vitesse à laquelle se fait le transfert thermique à travers une surface.

De même qu'en électromagnétisme, on définit un vecteur densité de flux thermique, qui représente en tout point de l'espace la direction et le sens du transfert thermique. Pour une surface infinitésimale dS orientée (surface mésoscopique), le flux élémentaire à travers cette surface s'écrit :

dΦ=jndS(4)

Pour une surface de taille macroscopique, le flux thermique est le flux du vecteur densité de flux thermique :

Φ(t)=ΣjndS(5)

2.c. Loi de Fourier

Considérons une plaque d'épaisseur e dont les deux faces sont maintenues à des températures différentes. Soit Φ le flux thermique traversant une portion d'aire S de la plaque.

fourier.svgFigure pleine page

Joseph Fourier (mathématicien et physicien français 1768-1830), a obtenu expérimentalement la relation entre le flux thermique, la différence de température et l'épaisseur de la plaque. Lorsque les températures sont stationnaires, cette relation s'écrit :

Φ=SλT1-T2e(6)

Le flux par unité de surface (la densité de flux) est donc proportionnel à la différence de température et inversement proportionnel à l'épaisseur de la plaque. Le coefficient λ dépend du matériau de la plaque.

Cette relation est la loi de Fourier. Pour l'écrire de manière plus générale, considérons une température T(x,t) ne dépendant que d'une variable d'espace rectiligne. Si l'on considère la différence de température entre x et x+dx, on peut écrire :

j(x,t)=-λT(x+dx)-T(x)dx=-λTx(7)

On obtient ainsi une relation linéaire entre la densité de flux et la dérivée partielle de la température par rapport à x. Cette relation se généralise en utilisant l'opérateur gradient :

j=-λgrad T(8)

Le coefficient λ est la conductivité thermique du matériau. Voici des ordres de grandeur de conductivité :

../eqchaleur/figConduThermique.svgFigure pleine page

Voir aussi : conductivité thermique des matériaux de construction

Les métaux ont une conductivité de 10 à 100 fois plus grande que les non métaux. Cela vient du fait que les électrons libres des métaux (les électrons de conduction) transportent l'énergie d'un point à l'autre du métal, de manière beaucoup plus efficace que le mode de propagation par vibration des solides non métalliques. Les métaux sont donc de bon conducteurs thermiques pour la même raison qu'ils sont de bon conducteurs électriques.

2.d. Analogie électrique-thermique

Il y a une analogie entre la conduction thermique et la conduction électrique (en régime stationnaire), qui est très utile pour résoudre des problèmes de transfert thermique. Cette analogie repose sur la correspondance entre la quantité de chaleur Q et la charge électrique Qe d'une part, sur celle entre la température T et le potentiel électrostatique V d'autre part. Le tableau suivant montre les grandeurs thermiques et leurs analogues électriques :

electriquethermiqueQeQIΦjejVTje=-γgradVj=-λgradT

L'analogue de la loi de Fourier est la loi d'Ohm (qui a été découverte en second).

3. Équation de la chaleur

3.a. Problème unidirectionnel sans source

On considère un problème unidimensionnel en géométrie cartésienne, c'est-à-dire un problème dans lequel la température ne dépend que d'une variable d'espace x, l'abscisse sur un axe, et du temps :

T(x,t)(9)

Pour établir une équation différentielle vérifiée par cette fonction, on commence par appliquer le premier principe de la thermodynamique à un volume infinitésimal de matière, compris entre x et x+dx et d'aire S.

eqchaleur.svgFigure pleine page

La surface en x, orientée dans le sens de l'axe, est traversée par un flux thermique Φ(x,t) . Au même instant, la surface en x+dx est traversée par un flux Φ(x+dx,t) , qui peut être différent du premier. On applique le premier principe entre l'instant t et l'instant t+dt. En l'absence de source thermique, il n'y a pas de travail. On utilise l'enthalpie car la pression est constante. Si δH(t) désigne l'enthalpie du volume de matière compris entre x et x+dx, le premier principe s'écrit :

δH(t+dt)-δH(t)=Φ(x)dt-Φ(x+dx)dt(10)

En introduisant l'enthalpie volumique h(x,t) et en divisant par l'aire S, on obtient :

(h(x,t+dt)-h(x,t))dx=(j(x,t)-j(x+dx,t))dt(11)

ce qui conduit à l'équation à dérivées partielles suivante :

ht+jx=0(12)

Cette équation est la forme locale de la conservation de l'énergie, similaire à la forme locale de la conservation de la charge.

La deuxième étape consiste à écrire la relation entre l'enthalpie et la température. On suppose qu'il n'y ni réaction chimique ni changement d'état dans le milieu. L'enthalpie est alors une fonction de T seulement (la pression est constante). On peut alors écrire :

ht=ρcpTt(13)

cp est la capacité thermique massique à pression constante et ρ la masse volumique.

On écrit pour finir la loi de Fourier :

j=-λTx(14)

On suppose que la conductivité thermique ne dépend pas de x, c'est-à-dire que la conduction se fait dans un seul matériau homogène. La conductivité thermique dépend de la température, mais on peut négliger cette variation en première approximation. On a alors :

jx=-λ2 Tx2(15)

En reportant (13) et (15) dans la forme locale du premier principe (12), on obtient l'équation différentielle suivante :

ρcpTt=λ2 Tx2(16)

Il s'agit d'une équation à dérivées partielles, appelée équation de la chaleur. Pour l'écrire sous une forme plus générale, on définit un coefficient de diffusion thermique :

D=λρcp(17)

Le coefficient de diffusion est en m2/s. L'équation obtenue est l'équation de diffusion :

Tt=D2 Tx2(18)

Le phénomène de diffusion de particules obéit à la même équation, en remplaçant T par la concentration de l'espèce diffusante. Ainsi la conduction thermique est un phénomène de diffusion, appelé diffusion thermique.

3.b. Cas général avec source

On dit qu'il y a une source thermique lorsque de l'énergie est apportée au sein du milieu dans lequel se fait la conduction. Il peut s'agir d'une dissipation électrique ou d'une réaction chimique dans le milieu. Ce type de phénomène se traduit par l'apparition d'une puissance volumique p, positive lorsque le milieu reçoit de l'énergie. Par exemple, pour une réaction chimique exothermique p>0. L'équation de la chaleur s'écrit alors :

ρcpTt=λ2 Tx2+p(19)

La forme la plus générale de l'équation de la chaleur, lorsque la température dépend de trois variables d'espace, fait intervenir l'opérateur laplacien :

ρcpTt=λ2T+p(20)

3.c. Condition initiale et conditions limites

Considérons le problème général de résolution de l'équation de diffusion :

Tt=D2 Tx2(21)

La température T(x,t) recherchée est une fonction continue de la variable x et du temps. Sa dérivée par rapport à x est également continue.

On cherche une solution T(x,t) sur un intervalle x[a,b] , dont les bornes sont éventuellement infinies. Dans le cas d'une résolution numérique, ces bornes sont nécessairement finies.

Pour obtenir une solution unique, on doit disposer d'une condition initiale sur cet intervalle :

T(x,0)(22)

Il faut par ailleurs préciser des conditions limites sur les bornes de l'intervalle. Il existe plusieurs types de conditions limites. La première consiste à fixer la valeur de la température :

T(a,t)=Ta(23)

Cette condition est utilisée lorsque l'extérieur a une température fixée.

Dans d'autres cas, le flux thermique à travers la frontière est nul (frontière adiabatique). En utilisant la loi de Fourier, la condition limite s'écrit :

Tx(a,t)=0(24)

Lorsque la condition initiale et les deux conditions limites sont fixées, on peut en principe obtenir la fonction T(x,t) pour t>0. Une solution analytique existe pour quelques problèmes simples, mais on est le plus souvent amené à faire une résolution numérique.

3.d. Conduction dans une plaque

On considère une plaque d'épaisseur e, dont les deux faces ont une température fixée (par un thermostat). La température en x=0 est T1, la température en x=e est T2<T1. La plaque est assez grande pour qu'on puisse considérer que la température ne dépend que de x.

plaque.svgFigure pleine page

On suppose qu'à t=0 la plaque a la température T2. La température initiale présente une discontinuité en x=0 mais pour t>0 elle est bien une fonction continue de x.

Pour résoudre numériquement une équation différentielle, il est bon de travailler avec des grandeurs sans dimensions. On commence par faire le changement de variable suivant :

x=ex'(25)

x' est une variable sans dimensions définie sur l'intervalle [0,1].

On pose alors :

τ=e2D=e2ρcpλ(26)

et on fait le changement de variable sur le temps :

t=τt'(27)

L'équation à résoudre numériquement est alors :

Tt'=2 Tx'2(28)

L'équation étant linéaire, on peut aussi faire le changement de variable suivant pour la température :

T'=T-T2T1-T2(29)

T' vérifie la même équation différentielle :

T't'=2 T'x'2(30)

mais les conditions initiale et limites s'écrivent :

T'(x',0)=0(31)T'(0,t')=1(32)T'(1,t')=0(33)

Voici la solution obtenue numériquement pour différentes valeurs de t :

../diffusion1d/figA.svgFigure pleine page

La simulation Diffusion à une dimension permet de voir une animation temporelle.

Bien que la condition initiale présente une discontinuité en x=0, la température obtenue est bien une fonction continue pour t>0.

L'évolution du profil de température est rapide au début, puis devient de plus en plus lente. On remarque aussi que la température n'évolue plus du tout après une durée t'=0,12. On atteint donc un régime stationnaire, qui n'est pas un équilibre thermique puisque la température n'est pas uniforme. Le régime stationnaire est défini par la condition :

Tt=0(34)

Le temps qu'il faut pour atteindre le régime stationnaire est ici 0,12τ. Cette durée dépend du coefficient de diffusion thermique et de l'épaisseur de la plaque. Elle est proportionnelle au carré de l'épaisseur. Le tableau suivant donne quelques valeurs de coefficients de diffusion :

Materiauλ (W/m/K)ρ (kg/m3)c (J/K/kg)D (m2/s)
Aluminium23727008979.8e-05
Fer80.278704492.3e-05
Tungsten174193001326.8e-05
Eau(l)0.61100041801.5e-07
Eau(s)2.291720501.2e-06
Azote(g)0.0261.1510402.2e-05
Silice1.422007039e-07

Les gaz ont un coefficient de diffusion du même ordre que les métaux, bien que leur conductivité thermique soit beaucoup plus faible. Cela est dû à leur faible masse volumique.

Pour une paroi en verre d'épaisseur e=1mm, on obtient un temps d'environ τ=1s. Pour un métal, ce temps est 10 fois plus faible. Si la paroi a une épaisseur de 10mm, le temps devient τ=100s. Pour une épaisseur de 10cm, le temps est τ=10000s. La diffusion est donc rapide sur des courtes distances, très lentes sur des grandes distances. À l'échelle mésoscopique, la diffusion est très rapide (par rapport à la seconde).

3.e. Échange thermique entre deux solides

C'est l'exemple cité au début de ce chapitre. Deux corps initialement à deux températures différentes sont mis en contact à l'instant t=0. On suppose qu'il n'y a pas d'échange thermique avec l'extérieur. Après des changements de variables analogues aux précédents, les conditions initiale et limites sont :

T'(x',0)=1pourx'<12(35)T'(x',0)=0pourx'>12(36)T'x'(0,t')=0(37)T'x'(1,t')=0(38)

Voici le résultat d'un calcul numérique (ce problème a une solution analytique) :

../diffusion1d/figC.svgFigure pleine page

Le régime stationnaire est dans ce cas un état d'équilibre, caractérisé par une température uniforme. Le temps nécessaire pour atteindre cet état d'équilibre est environ 0,2τ.

3.f. Dissipation électrique dans une plaque

Une plaque est soumise à une puissance dissipée p uniforme. La température est la même sur ces deux faces, supposée constante.

../diffusion1d/figD.svgFigure pleine page

En régime stationnaire, la température prend un profil parabolique, avec un maximum au milieu de la plaque. Les deux faces sont soumises à deux flux opposés.

4. Régime stationnaire

4.a. Bilan d'énergie et Équation de Poisson

En régime stationnaire, la température ne dépend plus du temps. L'équation de la chaleur devient alors :

2T=-pλ(39)

La température en régime stationnaire vérifie l'équation de Poisson, qui devient l'équation de Laplace en l'absence de sources. Les problèmes de conduction thermique stationnaire sont donc analogues aux problèmes d'électrostatique, où le potentiel vérifie l'équation :

2V=-ρε0(40)

Il peut être utile d'écrire un bilan d'énergie en régime stationnaire pour une surface fermée. En régime stationnaire, l'enthalpie du volume délimité par la surface ne varie pas. Le premier principe s'écrit donc pour une surface fermée :

Vpdv=SjndS(41)

La puissance générée par les sources dans le volume est entièrement évacuée sous forme de flux thermique (flux sortant). En l'absence de source, le flux thermique sur une surface fermée est nul. Cette propriété est la conservation du flux. Pour une géométrie unidirectionnelle, elle se traduit par une densité de flux j uniforme (et constante).

4.b. Conduction dans une plaque

On reprend le problème de la conduction dans une plaque défini plus haut, en considérant directement le régime stationnaire. L'équation vérifiée par la température en régime stationnaire est :

2 Tx2=0(42)

Il est important de remarquer que cette équation n'est valable que si la conductivité thermique est la même dans toute la plaque (c'était une hypothèse pour établir l'équation de la chaleur). En intégrant une fois cette équation, on en déduit que la dérivée est une constante :

Tx=C(43)

En raison de la loi de Fourier, cette dérivée est proportionnelle au flux surfacique :

Tx=-jλ(44)

Le flux est donc uniforme. Son expression s'obtient alors en fonction des températures des faces :

j=λT1-T2e(45)

En intégrant une seconde fois l'équation différentielle, on obtient finalement :

T(x)=T1+T2-T1ex(46)

Le profil de température dans la plaque est une fonction affine, ce qui correspond au fait que le flux est uniforme.

Considérons une partie de la plaque d'aire S. Le flux thermique à travers cette aire est :

Φ=SλT1-T2e(47)

On écrit cette relation sous la forme :

T1-T2=eSλΦ(48)

En utilisant l'analogie électrique-thermique remarquée plus haut, on reconnaît dans cette relation l'analogue de la loi d'Ohm U=RI. Cela nous amène à définir une résistance thermique pour la plaque :

R=eSλ(49)

On définit aussi la conductance thermique G=1/R. Pour une différence de température donnée, plus la conductance est grande, plus le flux est grand. Cette relation peut se retrouver facilement si l'on se rappelle que la résistance ne dépend que de e, S et λ. Lorsqu'on augmente la surface, on augmente le flux donc on augmente la conductance.

Calculer la résistance thermique par unité de surface d'un mur en béton de 20cm d'épaisseur, avec une conductivité λ=1,7W⋅K-1⋅m-1. En déduire le flux thermique surfacique pour une différence de température de 20K.

4.c. Conduction dans deux plaques

Une paroi est constituée de deux plaques de conductivités différentes.

deuxPlaques.svgFigure pleine page

Voici la solution numérique de l'équation de la chaleur, pour deux plaques de même épaisseur :

../diffusion1d/figB.svgFigure pleine page

On remarque que la dérivée de la température n'est pas continue sur la frontière. L'équation de la chaleur n'est pas valable sur la frontière, car λ n'est pas identique de part et d'autre de cette frontière. Il faut donc résoudre ce problème en traitant séparément les deux plaques et en écrivant la continuité de la température à la frontière.

En régime stationnaire, le profil est rectiligne dans chaque plaque, mais la pente n'est pas la même. En effet, le flux thermique est toujours uniforme donc la pente est plus faible dans la plaque de plus forte conductivité.

En régime stationnaire, on obtient la solution très simplement en utilisant les résistances thermiques des deux plaques. Pour cela, on remarque que le même flux traverse les deux plaques. Il faut donc associer les résistances en série, comme indiqué sur la figure ci-dessus.

La résistance totale est donc :

R=e1Sλ1+e2Sλ2(50)
Calculer la résistance thermique (par unité de surface) d'un mur d'habitation constitué du mur en béton auquel on ajoute 15cm de laine de roche, de conductivité thermique 0,035W⋅K-1⋅m-1, et une plaque de plâtre d'épaisseur 13mm et de résistance thermique 0,050K⋅W-1⋅m2.

La situation est tout à fait différente si les deux plaques sont côte-à-côte :

deuxPlaquesParalleles.svgFigure pleine page

Dans ce cas, les températures sont les mêmes de part et d'autre des deux résistances, et le flux total qui traverse les deux plaques est la somme des deux flux :

Φ=Φ1+Φ2(51)

Les deux résistances sont donc en parallèle :

1R=1R1+1R2(52)

4.d. Dissipation dans une plaque

On reprend le problème exposé plus haut, avec une plaque soumise à une dissipation électrique uniforme. En présence de source, on ne peut pas utiliser la résistance thermique pour cette plaque. On doit donc résoudre l'équation :

d2Tdx2=-pλ(53)

Lorsque le terme de source est uniforme dans toute la plaque, la solution est un profil de température parabolique. On adopte les conditions limites suivantes :

T(0)=T1(54)T(e)=T1(55)
Résoudre l'équation avec ces conditions limites et calculer la température au milieu de la plaque. Calculer aussi le flux thermique sortant de la plaque.

5. Convection

5.a. Convection au voisinage des surfaces

L'échange thermique par convection est causé par un mouvement macroscopique de fluide. Son étude rigoureuse relève de la mécanique des fluides et sort donc du cadre de ce cours. On peut néanmoins en donner une description simplifiée, en se limitant au voisinage des surfaces des solides.

On considère le cas d'un écoulement de fluide forcé (par exemple par un ventilateur), se faisant tangentiellement à la surface plane du solide. La figure suivante représente schématiquement la vitesse du fluide et la température au voisinage de la surface. La température de surface du solide est notée Ts; la température du fluide loin de la surface est notée T .

convection.svgFigure pleine page

La couche limite est une couche au voisinage de la surface dans laquelle la vitesse du fluide varie (elle s'annule sur la surface). La température présente aussi une variation continue entre la température de surface du solide et la température du fluide T . L'épaisseur de la couche limite dépend beaucoup de la forme, de la taille du solide et de la vitesse de l'écoulement.

Dans la couche limite, les transferts thermiques se font par conduction à petite échelle, par mouvement de fluide à plus grande échelle. Il s'agit donc d'échanges conducto-convectifs, appelés plus simplement échanges par convection.

Soit Φs le flux thermique sur la surface du solide, défini dans le sens sortant par rapport au solide. Il existe une relation linéaire entre ce flux et la différence de température entre la surface et le fluide. Cette relation est appelée loi de Newton, car celui-ci avait remarqué que la vitesse de refroidissement d'un corps est proportionnelle à la différence de température entre ce corps et le milieu extérieur.

Φs=Sh(Ts-T)(56)

S est l'aire de la portion de surface considérée. Le coefficient h est le coefficient de convection (en W⋅m-2⋅K-1). Il dépend des propriétés thermodynamiques du fluide, mais aussi de l'écoulement du fluide au voisinage de la surface. Plus l'écoulement est rapide, plus h est élevé. Il est plus grand pour un liquide que pour un gaz.

On parle de convection forcée lorsque l'écoulement du fluide a une cause extérieure à l'échange thermique. Par exemple une circulation d'eau dans un système de refroidissement permet d'obtenir un coefficient h de l'ordre de plusieurs dizaines de milliers. La convection libre (ou convection naturelle) est causée par la diminution de densité qui a lieu au voisinage d'une surface chaude (ou l'inverse pour une surface froide). Sous l'effet de la pesanteur, les différences de densité provoquent des mouvements de fluide. Par exemple, une convection libre se développe au dessus d'un convecteur électrique, ou au dessus d'une surface d'une plaque chauffante. Bien que l'écoulement du fluide soit beaucoup plus complexe que celui décrit ci-dessus, la loi de Newton s'applique approximativement.

Le coefficient de convection est plus élevé pour une convection forcée que pour une convection libre. Pour une convection libre, un ordre de grandeur est h=10W⋅m-2⋅K-1 pour un gaz, h=100W⋅m-2⋅K-1 pour un liquide.

La loi de Newton établit une relation linéaire entre le flux thermique et une différence de température. Elle ressemble à la loi de Fourier. Cependant, alors que la conductivité thermique est une grandeur qui peut être connue avec précision, le coefficient de convection h est un paramètre empirique, extrêmement sensible aux conditions expérimentales. Dans la plupart des cas, seul son ordre de grandeur peut être donné.

5.b. Condition limite convective

Dans le solide, les échanges se font par conduction et obéissent à la loi de Fourier. L'échange thermique entre le solide et le fluide environnant est modélisé par la loi de Newton. Sur la surface, il y a continuité du flux. On écrit donc (l'axe x est orienté dans le sens sortant et la surface est en x=0) :

-λTx(0,t)=h(T(0)-T)(57)

5.c. Plaque avec convection

On reprend le problème de la plaque, en considérant à présent les échanges convectifs entre les faces de la plaque et le fluide de part et d'autre. T1 désigne alors la température du fluide loin de la surface, de même pour T2.

plaqueConvection.svgFigure pleine page

On définit des résistances thermiques pour les couches limites convectives :

R1=1Sh1,R2=1Sh2(58)

La résistance thermique de conduction dans la plaque est :

Rp=eSλ(59)

Les trois résistances sont associées en série, puisque le même flux les traverse. On a donc une résistance totale :

Rt=1Sh1+eSλ+1Sh2(60)

En pratique, il est intéressant de calculer séparément ces trois résistances, pour voir celle qui limite le flux.

Considérons comme exemple un récipient en verre dont la paroi a une épaisseur e=4,0mm. Pour une conductivité λ=1,0W⋅m-1⋅K-1 et une surface S=1,0m2, on a R=0,0020W⋅K-1. Pour une convection naturelle, les coefficients h1 et h2 sont de l'ordre de 10 à 100. La résistance de convection est donc nettement plus grande que la résistance de conduction. La résistance thermique est dominée par la convection. Dans ce cas, la différence de température entre les deux faces de la paroi est beaucoup plus petite que la différence T1-T2. Autrement dit, la température dans la paroi est pratiquement uniforme.

Calculer la résistance thermique du mur isolé en tenant compte d'un coefficient de convection hi=10W⋅m-2⋅K-1 à l'intérieur de l'habitation et he=100W⋅m-2⋅K-1 à l'extérieur.
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